Entretien avec Claude MUSAVYI, nouveau Président de la COING-OIF (Organisation Internationale de la Francophonie)

Élu le 2 octobre 2025 à la présidence de la Conférence des Organisations internationales Non Gouvernementales auprès de l’Organisation internationale de la Francophonie, Claude Musavyi, également membre de l’équipe de direction de l’Institut Afrique Monde (IAM), incarne une génération d’acteurs francophones convaincus que la société civile doit trouver toute sa place dans la diplomatie du XXIᵉ siècle. Limoges/Paris, le 17 octobre 2017

Propos recueillis par Pierrick Hamon  et Jean-Claude Mairal

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« Pour une Francophonie du lien, de la confiance et de l’action »

I-Dialogos :  Claude Musavyi, pouvez-vous nous présenter le rôle de la COING et la place que l’OIF accorde aujourd’hui à la société civile dans la Francophonie ? 

Claude Musavyi : La COING est, en quelque sorte, la voix citoyenne de la Francophonie. Elle fédère, sur les cinq continents, plus de 12O organisations internationales non gouvernementales (OING) accréditées auprès de l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF). Ensemble, ces organisations constituent un espace unique de concertation, de proposition et de représentation de la société civile francophone organisée. 

Le rôle de la COING dépasse largement la simple consultation : elle est une force d’initiative, d’innovation et de transformation, capable de relayer les préoccupations des acteurs de terrain - qu’ils œuvrent dans l’éducation, les droits humains, la jeunesse, le développement durable ou la culture. 

La société civile n’est plus une périphérie du système francophone. Elle en est devenue l’un des moteurs essentiels, par la volonté politique des États et gouvernements qui ont consacré son rôle dans la Charte de la Francophonie de 2005. 

Aujourd’hui, grâce à la vision et au soutien des autorités actuelles de l’OIF, qui lui reconnaissent une place croissante et lui accordent des appuis institutionnels et matériels renforcés, la société civile s’affirme comme le cœur battant de l’espace francophone - celui qui relie les institutions aux citoyens et qui, par sa créativité, nourrit la vitalité démocratique, sociale et culturelle de la Francophonie. 

I-Dialogos :  Le XIXᵉ Sommet de la Francophonie à Villers-Cotterêts a insisté sur la nécessité d’un lien renforcé entre parlementaires, acteurs locaux et société civile. Comment envisagez-vous, avec la COING, de contribuer à une Francophonie plus horizontale et collaborative? 

Claude Musavyi : Le Sommet de Villers-Cotterêts a ouvert une nouvelle ère : celle du dialogue à plusieurs voix. Je crois que la Francophonie ne doit plus être perçue comme un édifice vertical, mais comme un écosystème vivant où chaque acteur - parlementaire, maire, entrepreneur, universitaire ou citoyen - apporte sa pierre à l’édifice.

La COING, à cet égard, est un levier décisif pour rapprocher la diplomatie institutionnelle de la « diplomatie citoyenne collaborative » que nous voulons construire. C’est la vision fondatrice du mandat entamé depuis le 2 octobre. Cette vision repose sur un principe simple : l’intelligence du lien

En associant les diplomaties citoyenne, territoriale (celle des villes et des régions), économique et parlementaire (APF), nous faisons émerger une Francophonie du partenariat, fondée sur la confiance et la co-construction. Ce que nous portons, c’est une diplomatie du lien, de la responsabilité partagée et de la créativité collective .  

I-Dialogos :  Quelles seront vos priorités pour l’année 2025 à la tête de la COING? 

Claude Musavyi : L’année 2025/2026 doit être celle de l’innovation dans la gouvernance interne, de la collaboration fructueuse et du rayonnement. Trois priorités guident l’action du Comité de suivi, notre organe exécutif : D’abord, consolider la gouvernance interne, entretenir un climat de transparence et de collégialité pour que chaque membre se sente écouté et respecté.

Ensuite, valoriser les initiatives des organisations membres, leur donner visibilité et reconnaissance au sein de la Francophonie et auprès de nos partenaires. Enfin, renforcer la voix et le rayonnement international de la COING, notamment sur des thèmes majeurs tels que la paix, la démocratie, l’autonomisation durable de la jeunesse, l’éducation, l’innovation sociale, la mobilité circulaire des talents, la finance responsable au service des transformations sociétales durables, etc.

Dans cette perspective, nous allons créer un Groupe ad hoc sur la diplomatie citoyenne collaborative, et lancer deux initiatives pluri-acteurs expérimentales pour rendre concrète cette dynamique de coopération. 

Ce mandat partiel d’un an doit être celui de la relance collective. Nous voulons transformer la transition en tremplin .

I-Dialogos :  Envisagez-vous de développer des partenariats avec les laboratoires d’idées et think tanks de l’espace francophone? 

Claude Musavyi : C’est une évidence. Les think tanks sont aujourd’hui des acteurs incontournables de la réflexion stratégique et du débat public. Ils permettent d’ancrer la décision dans la connaissance, de nourrir l’action par la pensée. 

Je souhaite que la COING devienne un hub intellectuel et opérationnel au service de la Francophonie, en travaillant main dans la main avec les laboratoires d’idées, les universités et les centres de recherche. 

Cette coopération doit renforcer notre capacité d’analyse et d’anticipation sur des sujets tels que la jeunesse, la finance durable, la transition écologique ou l’innovation sociale. 

L’alliance entre expertise et engagement citoyen est ce qui fera de la Francophonie un laboratoire de solutions pour le monde .

I-Dialogos :   Enfin, pouvez-vous nous en dire davantage sur l’Institut Afrique Monde et les passerelles entre vos engagements associatifs et votre nouvelle responsabilité à la tête de la COING? 

Claude Musavyi : L’Institut Afrique Monde (IAM) est un think tank indépendant et citoyen, qui promeut depuis sa création un dialogue fécond entre l’Afrique et le monde autour des grands enjeux éducatifs, culturels, économiques, etc.

J’y ai appris la valeur du croisement des regards et des savoirs. L’IAM produit des idées, la COING mobilise des acteurs : les deux approches sont complémentaires.

À la présidence de la COING, je souhaite justement mettre cette synergie au service d’une Francophonie d’impact - une Francophonie d’action, de connaissance et de solidarité. Nous avons une responsabilité commune : faire de notre espace francophone un lieu de transformation partagée, où les peuples et les territoires avancent ensemble.

Ma conviction est que la Francophonie de demain sera celle qui saura écouter, relier et agir. C’est cette Francophonie du lien que je veux servir. 

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