Rencontre avec René ASSOUS, passeur de la musique tunisienne et de la tradition arabo-andalouse

La passion et l’engagement de René Assous pour la musique tunisienne sont indissociables de son histoire personnelle. Il nous a reçu ce 12 novembre. et nous l'en remercions. Rencontre. PH

Secrétaire général de l’Association France–Tunisie, René Assous précise tenir cet héritage de son père, musicien et violoniste amateur dans le Tunis des années 1930. Celui-ci fréquentait de nombreux artistes, principalement issus de la variété tunisienne, et avait même fondé un petit ensemble, l’Orchestre de la Gaîté, qui se produisait régulièrement à la radio. 

René Assous rappelle que la musique tunisienne entretient une grande proximité avec les musiques moyen-orientales, notamment dans sa forme classique traditionnelle : le magnifique Malouf tunisien. 

Issue de multiples civilisations, la culture tunisienne est riche d’un long métissage, porté aussi par l’esprit voyageur des Tunisiens, héritiers des Phéniciens. La musique dite arabo-andalouse reflète ainsi des influences venues du Liban, d’Égypte, et de bien d’autres horizons. 

La musique tunisienne comme potion magique ?

C'est donc à l'âge de vingt ans à peine que René Assous rencontre le président de RTF Tunisie. Séduit par la curiosité du jeune homme pour la musique du pays, celui-ci lui offre quelques disques de musique traditionnelle. 

Très vite, Radio Tunis lui confie l’animation d’une émission intitulée Si vedette m’était contée, consacrée aux célébrités tunisiennes mais aussi françaises de l’époque : le ténor Michel Dens, l’humoriste Raymond Devos, la jeune chanteuse Marie-Josée Neuville, entre autres. 

Son père l’encourage ensuite en lui offrant un séjour à Paris. René y rencontre, au siège d’Europe n°1, plusieurs personnalités dont Michel Péricard et François Gerbaud, qui, selon lui, « lui mettront le pied à l’étrier ». Il fait également la connaissance de l’architecte franco-tunisien Olivier Clément Kakoun, cousin germain de son père, dont il aime rappeler le souvenir. 

Plus récemment, il retrouve nombre de ces figures dans un ouvrage « Les Tunes », sorte de dictionnaire consacré non seulement aux juifs tunisiens — dont la famille Assous fait partie depuis longtemps et qui parle arabe — mais aussi à celles et ceux, juifs, chrétiens ou musulmans, qui ont vécu avec la  Tunisie et contribué, coté européen, à son rayonnement : Claudia Cardinale bien sûr, mais également le couturier Loris Azzaro, le cinéaste Ferid Boughedir, le président Habib Bourguiba, Michel Boujenah, Philippe Séguin, Gabriel Attal, Claude Bartolone, et bien d’autres. 

Dans les studios de Europe N°1, en 1958, 

René Assous (à droite sur la photo)  avec François Gerbaud

Resté toute sa vie passionné par la musique tunisienne, René Assous s’est donc consacré, parallèlement à sa carrière, à faire connaître et aimer le malouf, la tradition arabo-andalouse et les innombrables expressions musicales du patrimoine tunisien. 

Son émission demeure, pour de nombreux auditeurs d'age mur, un véritable espace de transmission culturelle, fidèle à sa conviction que la musique est un bien commun reliant les rives de la Méditerranée.

Amina Srarfi-El'Azifet

La conférence du 27 septembre 2018 à la Maison de la Tunisie

En présence de M. Walid METOUI, premier Secrétaire, représentant SE M. l’Ambassadeur de Tunisie en France, ainsi que Naoufel ZIADI du Consulat Général de Tunisie à Paris et Mohamed Habib SASSI, Consul de Tunisie à Pantin, chaleureusement remerciés par le conférencier.

Dans cette dernière et mémorable conférence, « L’âge d’or de la musique tunisienne », donnée à la Maison de la Tunisie le 27 septembre 2018, René Assous souligne la richesse et la diversité de la musique traditionnelle tunisienne. Il y évoque les figures légendaires qui ont façonné l’âme sonore de la Tunisie moderne. 

Parmi elles, trois noms continuent de briller : Habiba Msika, Cheikh El Afrit et Ali Riahi.

Habiba Messika

Par leurs voix, leur audace et leur modernité, ces artistes ont su faire dialoguer l’héritage arabo-andalou avec les sensibilités nouvelles d’une société en pleine transformation, accompagnée par la vision réformatrice du président Habib Bourguiba.

  • Habiba Msika, étoile fulgurante de la scène tunisienne des années 1920, fut bien plus qu’une chanteuse : une femme libre, passionnée, qui fit de sa voix un cri d’émancipation. Danseuse et comédienne, elle osa aborder des thèmes sensibles et imposa la figure d’une artiste totale, éprise de beauté et de liberté.
  • Cheikh El Afrit, de son vrai nom Israël Rosio, fit rayonner la chanson tunisienne à travers le monde arabe et jusqu’à Paris. Maître du malouf et des chansons sentimentales, il allia l’élégance du chant classique oriental à la richesse mélodique du patrimoine tunisien. Son art marie émotion, rigueur et universalité.
  • Ali Riahi, le « rossignol de la Tunisie », incarna la synthèse parfaite entre tradition et modernité. Héritier d’une grande lignée musicale, il donna au chant tunisien une dimension populaire et joyeuse, accessible à tous. Sa voix lumineuse accompagna les fêtes, les radios et les mémoires familiales, au point de devenir un symbole national.

À travers ces portraits, René Assous montre combien la musique tunisienne constitue un miroir vivant de l’histoire du pays : un langage universel reliant les générations et les peuples, qui transcende les frontières et le temps. En Tunisie, ce lien demeure essentiel. 

Nous avons rencontré René Assous à son domicile parisien, en présence de son épouse Martine. Il nous a remis, avec enthousiasme, le texte de cette conférence.

Pierrick Hamon et René Assous ce 12 novembre

Tunisiens et Franco-Tunisiens, présents au sein du Comité de pilotage I-Dialogos, et parmi nos abonnés, retrouveront dans cette publication un pan précieux de leur mémoire culturelle. 

Ne pas hésiter à compléter si besoin : contact=> phamon@i-dialogos.com. Nous transmettrons.

Puisse-t-elle également contribuer à la relance de la vénérable association France–Tunisie. 

Pierrick Hamon

Délégué Général de I-Dialogos, Membre de l’association France-Tunisie, le 18 novembre 2025

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