RDC : un marché de dupes dénoncé par Denis MUKWEGE

Tina Mwangelu, Franco-Congolaise professionnelle en gestion financière est particulièrement engagée en faveur des droits humains et de la justice sociale. Forte de son expérience et de son implication dans des initiatives associatives, elle s’efforce, avec courage et lucidité, avec l'association qu'elle préside "JesuisRDC", de mettre en lumière les enjeux humanitaires en République démocratique du Congo, tout en promouvant des actions concrètes pour un développement durable et équitable. Convaincu de la puissance du dialogue, de l’histoire et de la solidarité, Tina Mwangelu a rejoint I-Dialogos.

RDC : Paix sans justice, souveraineté sans ressources — un marché de dupes dénoncé par le DR Denis MUKWEGE

Alors que la RDC, le Rwanda et les États-Unis viennent de publier une déclaration de principes censée ouvrir la voie à la paix dans la région des Grands Lacs, le dr Denis Mukwege, Prix Nobel de la Paix 2018, alerte : 

« Nous appelons à la transparence, à l'inclusivité et à l'obligation de rendre des comptes » (DeskEco, 26 avril 2025).

Derrière les grandes déclarations, plusieurs contradictions majeures apparaissent. 

D'un côté, l'accord affirme « reconnaître la souveraineté et l'intégrité territoriale » de la RDC. De l’autre, il organise un partage des ressources minières stratégiques, au profit d’investisseurs américains et du Rwanda, sous prétexte « d’intégration économique régionale ». 


Partager ses ressources sous supervision étrangère, c’est nier sa souveraineté. Aucun pays occidental n'accepterait cela sur son propre sol. On parle de paix, mais aucun mot sur les crimes de guerre, les viols massifs, les massacres documentés par les Nations Unies. Aucune justice, aucune réparation n'est prévue.

Pour Denis Mukwege, « il n’y aura pas de paix sans justice, ni de réconciliation sans vérité ». 

Or ici, c’est l’impunité qui est institutionnalisée. On prétend lutter contre les groupes armés, mais sans jamais reconnaître le rôle du Rwanda dans le soutien au M23, pourtant établi par des rapports onusiens. 

L’agresseur et la victime sont mis sur un même pied d’égalité, dans une dangereuse équivalence, contraire aux principes fondamentaux du droit international. 

La MONUSCO est appelée à être soutenue, alors même qu’elle est massivement rejetée par les Congolais pour son inefficacité et son absence de résultats tangibles en matière de protection des civils. 

Aucune remise en question n'est envisagée. Le statu quo prime sur la dignité humaine. 

Enfin, les États-Unis, facilitateurs auto-proclamés, sont aussi bénéficiaires directs du nouvel ordre économique autour des minerais critiques. Ils ne sont pas des arbitres neutres, mais des acteurs stratégiques engagés dans la compétition mondiale pour l’accès aux ressources. 

Le plus grave reste l'absence totale du peuple congolais dans ce processus.Aucun engagement pour les droits humains, pour la reconstruction, pour la restitution des terres spoliées.

Tout est décidé sans lui, contre lui. Le dr Mukwege le rappelle avec force: 

« Les droits des victimes ne doivent jamais être négociés à huis clos. » Pendant que l’on signe des accords de pillage sous couvert de paix, le peuple congolais attend toujours son tribunal de Nuremberg, pour juger les crimes de masse, les déplacements forcés, les violences sexuelles utilisées comme armes de guerre. 

Trente ans après le début du calvaire congolais, les mêmes logiques prédatrices produisent les mêmes tragédies : l’exploitation d’un peuple réduit au silence au nom du « développement » et de la « stabilité ». 

Sans justice, il n’y aura ni paix, ni développement, mais la perpétuation du cycle infernal de la violence et du pillage.
L’histoire jugera sévèrement ceux qui auront sacrifié un peuple au nom d’intérêts économiques.