La Démocratie, l’antidote à la violence qui progresse.

Jean-Claude Mairal est président de « Planète Jeunes reporters-Sur les pas d'Albert Londres » et co-fondateur de I-Dialogos

La violence s'installe peu à peu dans notre société: 

-agressions de policiers, de pompiers, d'enseignants, d'élus, de personnels soignants, etc. Cela va même jusqu'à des menaces de morts, voire d'assassinats (cf Samuel Paty, le bataclan, etc)

 -un radicalisme violent et agressif persuadé de détenir la vérité et qu'un changement ne peut venir que par des actions violentes (les black-blocs, des groupuscules écologistes tels que "extinction rébellion" qui vandalise des oeuvres d'art, avec certains végans qui s'en prennent à des bouchers, etc) 

-un radicalisme identitaire (indigénistes, extrême-droite, certains groupes religieux, etc) 

La politique et le syndicalisme qui par leur nombre d'adhérents et leur rayonnement, permettaient jusqu'aux années 90, même dans les grands moments de tension, de résoudre les conflits, sont désormais dans l'incapacité de le faire. 

Les partis politiques sont l'ombre d'eux-mêmes, avec de moins en moins d'adhérents. Ils ne convainquent qu'une minorité d'électrices et d'électeurs. Des politiques sont eux-mêmes porteurs de cette violence dans leurs propos et encouragent celle-ci. 

Les syndicats sont dans la même configuration. Ils sont très affaiblis, ne pèsent quasiment plus que dans le secteur public et les entreprises publiques et sont dans certains secteurs enfermés dans le corporatisme. 

Cette situation est grave de dangers pour l'avenir. Comme le développe Jérôme Fourquet dans son livre "L'archipel français", dans "une Nation multiple et divisée", nous sommes dans une société fracturée où on ne s'écoute plus et où on ne dialogue plus. Nous sommes dans une société où chaque parti politique, de nombreux mouvements, associations et autres organismes pensent détenir seul les solutions aux problèmes rencontrées, entraînant des tensions dans le corps social. 

Le concept de compromis entre différentes positions est voué aux gémonies. Chacun est persuadé de détenir la vérité. On a vu ce que cela a donné dans l'histoire avec les guerres, les pogroms, les guerres de religion, le nazisme, le fascisme, le stalinisme, etc. 

Certains analystes pensent que la violence va s'accentuer dans les années à venir, y compris par des agressions mortelles, si rien n’est fait pour y remédier. On ne peut accepter une telle perspective! 

Comment face à une telle situation, source de danger mortel pour les sociétés humaines, construire du commun entre les citoyens, par-delà leur diversité ? Telle est la question cruciale à laquelle il est impératif de répondre, sous peine de descendre aux enfers ! 

Comment faire face? 

Depuis plus de 20 ans, nous sommes un certain nombre à travailler les questions de la démocratie. Pas une démocratie formelle telle que nous la connaissons, avec le seul rituel des élections tous les 5 ou 6 ans, ni l'ersatz de la démocratie, qu'est la démocratie participative que prônent certains, mais une démocratie citoyenne où les citoyens sont auteurs et acteurs des politiques publiques et de leur propre émancipation. 

Les défis du 21ème siècle, l'urgence étant là, nécessitent absolument de construire du commun avec l'ensemble des citoyens, par un débat public large, ouvert et instruit, nourri par des controverses citoyennes. 

Un débat qui n'est pas simplement l'expression de joutes oratoires entre prétendants au pouvoir, mais un débat donnant à chaque citoyen les informations y compris contradictoires et les savoirs nécessaires pour se forger son opinion et co-construire ainsi avec l’ensemble des citoyens du commun. Il faut être conscient qu'il ne peut y avoir de démocratie sans parole. 

Et sans dialogue, fut il contradictoire, il n'y a pas de démocratie possible. Dialoguer, écouter l'autre, confronter les positions, les réflexions, admettre la diversité des opinions, même opposées, c'est la voie de l'efficacité et de la force d'une société.

Par expérience je peux affirmer l'apport et l'enrichissement à mes réflexions, de personnes qui étaient loin de partager mes propres convictions. 

Celles-ci ne m'ont jamais empêché tout au long de mes responsabilités politiques et d'élus, d'agir et de sympathiser avec des personnes qui n'avaient pas les mêmes opinions que moi sur telles ou telles questions, d'apprécier et de me reconnaître dans les politiques territoriales menées par des élus aux sensibilités différentes. 

Il m'arrive également d'être critique vis à vis de mes propres amis et en opposition avec certaines prises de positions. Dans un Monde complexe, aux prises avec des défis considérables pour l'avenir de l'Humanité, personne, aucun mouvement, parti politique ou organisation ne peut prétendre détenir à lui seul la vérité ou la solution à l'ensemble de ces enjeux. 

C’est en permettant à notre société d’être pleinement démocratique, soucieux de tous les citoyens que nous favoriserons l’émergence d’une société plus solidaire, plus fraternelle, plus respectueuse de l’environnement et plus responsable de son destin. 

La démocratie est plus que jamais le moyen et le but de tout projet de transformation sociale et écologique dans le respect de chacun. Certains me diront, ce sont de belles paroles, mais comment faire concrètement? 

Le meilleur moyen de crédibiliser une telle démarche, de lui donner de la consistance, c’est de commencer, maintenant, partout dans les territoires de proximité, à mettre en œuvre des pratiques de démocratie. La déclinaison territoriale au plus près des citoyens dans toute leur diversité sociale, politique et idéologique, est essentielle car elle permet l’ancrage des pratiques de citoyenneté au sein des populations. On démontre ainsi que chacun peut peser, concrètement, sur les choix, que l’on tient compte de l’avis et des propositions des populations. Cela redonne confiance en soi et en son avenir. 

On passe de la passivité à la responsabilité, de la résignation à l'action, de la colère à la construction de solutions. On apprend à coopérer, à agir et à construire du commun. Chaque citoyen doit être acteur et responsable des décisions et politiques le concernant et concernant son environnement. Les élus, les syndicats, les associations doivent être vecteurs et facilitateurs de cette parole et de l'action citoyenne.   

La démocratie citoyenne, l'implication des citoyens dans toutes leur diversité, la co-construction des politiques publiques dans l'ensemble des territoires, n'est-ce pas le moyen pour que renaisse la confiance dans les institutions et dans la politique ?

 N’est-ce pas le moyen de ressourcer la démocratie délégataire qui est en crise profonde actuellement. 

Le président de la République a lancé le conseil national de la refondation avec la volonté d'avoir des déclinaisons dans chaque bassin d'emplois et de formation. N’est-ce pas une opportunité à saisir! Je le pense profondément !

JC Mairal / 03-10-2022 

Conseil de lecture de trois auteurs qui aident grandement à développer une nouvelle approche de la démocratie :

-Jean-Paul Jouary auteur de "La parole du mille-pattes, difficile démocratie" éditions Encre Marine 

-Frédéric Gilli, auteur de "La promesse démocratique, place aux citoyens", éditions Armand Colin 

-David Djaïz, auteur de "Slow démocratie, comment maîtriser la mondialisation et reprendre notre destin en main" Allary Editions